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Jean-Pierre
Le temps était au rendez vous, même les quelques gouttes de pluie prédites par Gérard à Montbard le samedi soir étaient au rendez-vous.
Nous partîmes à quatre le samedi matin 5:00, nous arrivâmes à quatre le dimanche avant les 21 heures fatidiques marquant la fermeture du pointage après les 40 heures maxi réglementaires, mais les dormeurs furent largement distancés par les courageux. Gérard, qui semblait connaître déjà le parcours, qu'il découvrait, Henri et moi, qui le connaissions, mais sous la pluie (par beau temps, on ne reconnaît pas) et Claude qui avait apporté son beau vélo.
Jean-Pierre
De Noisiel à Château Thierry, une fois n'est pas coutume, pas de côtes: on reste dans la vallée de la Marne, jusqu'à Mont Saint Père (PK 91). Premiers morceaux de repas pour certains. Leurs sandwich jambon-baguette étaient à se mettre à genoux devant.
Après Château Thierry, le parcours, toujours face au vent, sort de la vallée et fait des montagnes russes qui ralentissent Claude jusqu'à Reims (Cormontreuil, 2° pointage au PK 148) Tous avaient pris le repas à 12€50: ce repas était une grande réussite à porter au crédit de l'ACP. À Reims, nous virons la bouée au vent et repartirons ensuite grand largue ou vent arrière.
Gérard
En partant les premiers nous avons vu passer quelques groupes bien pressés d'arriver. Nous avons accroché un wagon derrière un groupe rapide mais avec une relative modération. En haut de la côte à la sortie de la Chapelle sur Crécy l'essaim d'abeilles était éparpillé sur la route, après avoir fait environ 27 kilomètres dans la première heure! Nous avons alors roulé ensemble à un rythme plus raisonnable, jusqu'à ce que je retrouve Christine Turzinsky (ancienne responsable de la commission famille de la FFCT) avec Patrick, sur un nouveau tandem. Nous avons fait un bout de route ensemble et nous avons notamment parlé de la semaine suédoise à laquelle ils ont participé l'année dernière, ramenant pleins de souvenirs agréables, comme ceux que j'ai en mémoire depuis la première semaine de ce genre organisée en Suède, en 1983. Ce faisant, le rythme a accéléré un peu, notamment dans les descentes, désolé Claude mais je ne résiste pas au plaisir d'une bonne descente, surtout dans la roue d'un tandem!
Jean-Pierre
En quittant Reims, juste à l'attaque de la montagne de Reims, le groupe décide de se séparer en deux: les deux dormeurs qui veulent dormir et Gérard qui veut se tester sur un 600 véloce sans dormir, partons devant. Claude reste en repli avec un groupe de cyclos plus convenables. Lui non plus ne veut pas dormir, mais il veut rouler cool comme pour aller à Pékin. Nous nous reverrons à Troyes (pk 268): les uns finissant de dîner (omelettes aux pommes de terre et soupe: un régal), les autres arrivant pour occuper la table laissée chaude. C'est à Troyes que, après nous être fait tuyauter par un couple de tandémistes qui passe la nuit à Montbard, que nous réservons une chambre à l'hôtel de la gare: tous les cyclos non-stakhanovistes (les dormeurs, en fait) y sont.
Après Troyes où on arrive à 17:35, après ce départ de 5:00 de Noisiel, c'est le trajet collinneux, presque entièrement de jour, jusqu'à Montbard (du moins à partir de Chaource). Sur tout le parcours, vent dans le dos, pas de pluie, pas de chaleur étouffante: on roule, et on se fait très vite à l'idée d'être aussi forts à vélo. C'est bon, la vie à vélo vent dans le dos! À 23:00, on arrive à Montbard (PK 364), on abandonne lâchement au contrôle un Gérard qui a l'air fatigué, et on file à l'hôtel de la gare, pour dormir.
Gérard
Après Troyes, notre route est passée près d'un joli groupe de cerisiers et Henri n'a pas pu résister à la tentation, les deux autres complices non plus d'ailleurs. C'est vrai que par beau temps c'est vachement sympa, n'est-ce pas Jean-Pierre! Ensuite à la tombée du jour nous avons, par deux fois, croisé une biche sortie du bois. Tout allait bien, mais la prévision météo était juste et les nuages ont commencé à noircir et s'épaissir très localement, mais au dessus de nous. Au moment ou il commençait à faire bien noir une pluie diluvienne nous est tombée dessus, à quelques kilomètres de Montbard où nous sommes arrivés bien mouillés. Avec les feux arrière allumés, notamment celui de Jean-pierre, surpuissant et partiellement clignotant, je peinait à voir la route à travers mes lunettes couvertes de gouttes d'eau. J'avais d'autant plus de peine que, ne pensant plus qu'à se retrouver au sec dans un lit douillet, Jean-Pierre s'est mis à rouler comme un fou.
Jean-Pierre
À l'hôtel de la gare, un employé reste debout toute la nuit, reçoit les cyclos, leur fait des pti déj à toute heure et raconte ses souvenirs de course en 1° catégorie. Il aime les cyclos, se défonce pour les aider, et ça se voit. Un deuxième bon point au crédit de l'ACP (qui utilise parfois cet hôtel comme départ de flèche Vélocio). À 23:30, après un dîner VTS sur les lits, extinction des feux. Réveil à 4:00 pour départ à 4:30 à cause du vent contraire. On partira en réalité à 5:00, et ça suffira (près de deux heures de rab au dépouillement).
L'hôtel, c'est vraiment le renouveau du cyclo: douche, chauffage, linge propre, chambre chauffée et draps secs sur un vrai matelas moelleux. Des vrais petits coqs en pâte.
Pendant ce temps, Gérard et Claude roulent à tombeau ouvert dans le noir, du moins c'est comme ça que nous les voyons: ni coqs ni pâtes.
Gérard
Au contrôle à la MJC de Montbard à 11:00, je me suis retrouvé seul, grelottant avec mes habits mouillés, songeant plus à manger, me laver et remettre des vêtements secs, plutôt qu'à dormir, même si quelques matelas posés au sol dans une salle de sport semblaient prêts à nous accueillir pour quelques heures. J'ai bien un masque et des bouchons d'oreilles, mais l'objectif est de faire un 600 en une seule étape...
Je voulais faire un test grandeur nature, sans dormir, mais comme environ 75% des participants se sont arrêtés quelques heures à l'hôtel à Montbard, il n'y avait personne pour m'accompagner quand je me suis décidé à reprendre la route après 40 minutes d'arrêt réparateur. Je suis reparti seul dans la nuit et même au delà, puisque j'ai fait 200 Km en solitaire.
Quelques kilomètres après Montbard j'ai rencontré les plus belles côte de ce brevet, mais avec une bonne alimentation et la pause prolongée de Montbard tout est bien passé. Le temps était alors calme et les nuages ont rapidement laissé place à un clair de lune qui éclairait assez pour avoir une perception du paysage. J'ai eu une pensée pour Claire et ses compagnons de route dans la tempête de la semaine précédente, mais j'étais seul à profiter de cette douce nuit. La lueur lunaire n'était cependant pas suffisante pour trouver facilement la bonne route à Chablis. J'ai bien arrêté quelques voitures sans trouver d'aide, j'ai du m'appliquer dans la lecture de la carte pour trouver la petite route bien cachée et peu indiquée. Sur cette route j'ai aperçu un cyclo en papillote par terre dans un abri bus, ça ne m'à pas tenté. Un peu plus loin il me semble voir un feu rouge de vélo, il se rapproche, le pédalage est lent, je le salue en passant, mais je ne reçoit pas de réponse, il doit être en train de rêver à une bonne nuit à la maison. A Moret sur Loing je croiserai un cyclo qui s'est endormi et s'est généreusement griffé la figure en tombant dans un fossé. Le vélo n'a rien, mais la bête a le cou raide, il parviendra tout de même à terminer, devant moi d'ailleurs.
À La Malmaison la route était barrée et déviée. En regardant la carte j'ai vu que la déviation ne devait pas être longue et je l'ai prise pour ne pas risquer de me trouver dans un énorme chantier transformant l'aventure en parcours de combattant.
Arrivé à Joigny je me suis dopé avec un grand café et en ressortant du contrôle à 5h00, les premières lueurs du jour commençaient à poindre à l'horizon. La nuit a passé assez vite et le levé du jour avec le soleil est toujours un moment de plaisir dans ces randonnées. Plus que 150 kilomètres, c'est presque fini! Enfin jusqu'à Moret sur Loing ça continue à bien rouler, ensuite il commence à faire chaud, les côtes deviennent plus dures et le vent vient me ralentir.
Vers Beauvoir, alors qu'il reste 40 kilomètres à parcourir, deux cyclos fourbus et ayant hâte d'arriver à Noisiel me rattrapent à un moment où je commence à faiblir, j'ai remis du carburant tardivement et il faut attendre l'assimilation pour retrouver un coup de pédale léger. A tour de rôle chacun aura son moment de faiblesse, mais nous finirons ensemble à 12h45, satisfaits de notre qualification pour PBP.
Mon test a été concluant, je suis donc arrivé assez tôt et en bonne forme. L'absence de roulage aux chérubins la semaine précédente n'a, semble-t-il, pas affecté ma forme mais il faut être lucide: les conditions climatiques ont été globalement bonnes sur ce brevet.
Un appel à Jean-Pierre, encore à 30 kilomètres de Moret-sur-Loing, soit environ 105 kilomètres avant Noisiel, me laisse penser que les duettistes vont arriver tard. Claude ne répond pas mais je lui laisse un message. Il me rappellera peu après, en arrivant à Moret-sur-Loing. Il me demande de ne pas l'attendre, il songe à rentrer à Rueil en RER.
Il me reste à pique-niquer à l'ombre puis à faire une bonne sieste sur l'herbe, en attendant tout de même Claude que j'avais emmené au départ avec Henri. Claude arrivera vers 18h30 dans un état de fraîcheur remarquable, l'oeil vif, très content de sa qualification pour PBP et aussi d'être arrivé avant les lièvres Henri et Jean-Pierre.
Malgré la nuit dans un lit avec des draps propres, après une bonne douche et avec un petit déjeuner, les deux compères auront mis un peu plus de temps que moi pour rentrer de Montbard. Je me suis plus préoccupé de mon alimentation que pour le 400 de Mours et cette fois, je n'ai pas eu de trouble dans la nuit. Pas de doute: les aliments diététiques sont efficaces.
Enfin, les 9 cyclos de l'Abeille qui ont fait les brevets ont tous terminé et sont tous qualifiés pour PBP.
Jean-Pierre
Départ 5:00: brume et froid. Il faut éteindre les frontales pour ne pas illuminer les gouttes d'eau à hauteur des yeux.Tout de suite, on roule, et sans avoir froid avec nos vêtements secs. Entre Noyers et Chablis, on hésite à prendre le parcours de la flèche Bellegarde le long de la rivière Serein. Finalement, on opte pour les bosses du parcours lepertélien. Il n'y aura même pas de pointage secret à cet endroit pour le prouver. Le vent est faible mais dans le pif (le chien, manque Hercule). Pas de relayages dans la configuration retenue, sauf par Henri qui fait des tentatives extraordinaires d'offrir une bonne roue à vitesse constante quelle que soit la pente. On raffinera ce dernier détail plus tard. Alors, il faut rouler: ça forge le caractère.
Superbe étape à Joigny (pk 460). Pâtes à la Bolognaise pour moi: un très grand moment. Nous pensons à tous ces bistrots qui restent ouverts toute la nuit et servent à bouffer toute la nuit. De quoi rêver les yeux ouverts. Mais, on a beau dire: quand on a envie de dormir, on a très envie de dormir. Ca me prendra pendant tout le trajet. À ces moments, les moyennes tombent sans rémission sous 20. À Moret sur Loing, je retrouve le pointage du 400 ainsi que le retour interminable au bercail du 400, de 2 semaines avant, toujours autant face au vent.
Retour à 19 heurs passées de 5'. Les deux bistrots de Torcy sont fermés: pas de mousse mais il y a ce qu'il faut au bar gratuit de l'ACP. Si la fermeture avait été à 19h (en non à 21h), on aurait été éliminés Sic transit ... Gérard, nous l'apprenons en bouffant nos VTS sous un arbre à 13:00, est arrivé en roulant comme le randonneur chevronné qu'il est à 12:45. Claude arrive peu avant nous, en bon état, aux dires de Claude Lepertel, qui pointe nos cartons de lièvres, après 38 heures et 5 minutes. Et il y a des douches à Noisiel: ça aide à oublier ses misères et à rentrer dans le monde des vivants.
Je ne parviens plus à conserver les yeux ouverts, je suis déjà en train d'oublier mes galères de l'acte 3 pour ne retenir que la partie chouette. Alors j'arrête là. Bonne nuit à toutes et à tous.
Gérard
En finale, les 9 cyclos de l'Abeille qui ont fait les brevets les ont tous terminés et sont tous qualifiés pour PBP.
Bravo aux néophytes qui ont affronté la pluie et le vent du 600 de Mours, bravo aussi aux anciens qui ont tout autant souffert dans ce brevet. Mention spéciale pour le jeune vétéran de la troupe qui repique à l'exercice, 16 ans après son troisième raid à l'ouest!
Maintenant il faut valider la réponse à la question: PBP ou pas PBP?
Puis, si oui, quelle heure de départ ?
Et il faut passer encore quelques heures sur le vélo pour parfaire la préparation.
Sinon, il faut nettoyer le vélo avant de songer aux vacances.
De la raison ou du défi, lequel l'emportera ?
À suivre...
Gérard et Jean-Pierre
"Le Cyclotourisme, un art de vivre" |